Le pari des guetteurs de plumes africaines

Nicholas Drayson

Editions des Deux Terres

  • Conseillé par
    10 février 2011

    D'abord définissons les relations entre Harry Khan et M. Malik : "pendant les sept années suivantes [à l'Eastlands High School] il [Harry Khan] était devenu le fléau de la vie de M. Malik. Car Harry Khan était un asticoteur, un rigolo, un moqueur -et tout farceur doit avoir son farci. Farce qui avait commencé dès le premier matin." (p.29) Une fois cela dit, on voit que même 40 ans plus tard, les relations sont restées les mêmes : M. Malik, effacé, plutôt timide et gauche et Harry Khan, grande gueule, frimeur et bon vivant. Le concours parait alors tout à fait disproportionné, mais je n'en dirai pas plus. Et même si notre sympathie et notre soutien vont sans aucun doute à M. Malik, la compétition peut provoquer quelques surprises, car celui-ci a bien l'intention de gagner.

    Vous l'aurez compris, ce roman est drôle. Humour british so typical ! Enfin, ce que je pense être de l'humour anglais. Parfois le rire ou le sourire tient à presque rien : M. Malik sommé de répondre à une interrogation et plutôt partant pour stopper la conversation engagée qui l'agace fait une erreur : "Ce dernier [M. Malik], il faut le préciser, en était alors à son deuxième verre de Tusker, avec toute l'imprudence qui va de pair. Il aurait dû réagir en ces termes: "Hmm." Au lieu de quoi, il avait lâché ceci :

    - Hmm ?

    - Que voulez-vous dire, "Hmm" ?" (p.41)

    Et voici la conversation relancée et me voici moi, à rire à ce presque rien que je trouve vraiment hilarant. Je pourrais vous citer beaucoup d'exemples de passages drôles, mais mon article deviendrait trop long, je vous laisse donc le soin de les découvrir par vous-mêmes.

    Voyons l'histoire maintenant : elle tient la route largement. Si le principe du départ est simple voire simpliste, Nicholas Drayson ne se contente pas d'aligner les noms d'oiseaux, il nous montre les moeurs kenyanes, nous instruit sur la faune et la flore -surtout les oiseaux bien sûr- sans jamais être lourd. Il faut dire qu'il est aidé par les noms incroyables des volatiles vivant dans ce pays. Dépaysement assuré (bien vu : chaque titre de chapitre est un nom d'oiseau : "Le souïmanga à croupion pourpre", "L'euplecte ignicolore", "Le ganga à face noire", ...). Et puis, là où l'on pensait voir un héros, M. Malik, terne, pâle et en retrait, on s'aperçoit que le bonhomme n'est dépourvu ni de ressources ni d'humanité.

    En ces temps un peu moroses littérairement parlant -j'ai enchaîné quelques déceptions de lectures-, voici un roman qui m'a redonné le sourire et qui assurément peut le redonner -ou permettre de le garder- à tous.